Ma fille est dans le feu.
Littéralement.
C’est une image que je ne peux effacer de ma mémoire, comme si la seconde qu’elle a passé, les mains sur la bûche du petit feu de camping que nous admirions, avait explosé en fragment de souvenirs plus ou moins précis.
Je vois son papa se lever, je sais que je me suis levé, je sais que je l’ai attrapé au vol parce que papa l’avait déjà sortie du feu, je l’ai assise sur ma chaise de toile.
En quelques secondes, l’adrénaline coulant dans mes veines à la vitesse de la lumière, j’avais fait un bilan : elle est vivante.
Ses cheveux étaient intacts, ses vêtements également. Rien n’avait pris feu. Son visage n’était pas rouge, ni noir, ni blanc. Puis ses mains. J’ai vu sa main gauche en premier. Pleine de suie, déjà gonflée de bulles blanches. J’ai essayé très fort de ne pas le laisser paraître dans mon visage, mais, imaginant la douleur, j’ai grimacé. Ma fille m’a vu. De douleur et de peur, elle s’est mise à pleurer.
Fort. De plus en plus fort. Jusqu’à avoir l’air d’être possédée par le démon à cause des élancements de sa brûlure. J’avais mal pour elle, j’aurais pris sa douleur au centuple si j’avais pu. J’ai marché avec mon bébé de 3 ans dans les bras sur une bonne distance, j’aurais pu marcher 10 fois cette distance si il avait fallu. Je marchais vers le bloc sanitaire le plus près. Ma belle-sœur est arrivée peu de temps après, me disant qu’une infirmière lui avait offert son aide.
Quand un ange descend du ciel au moment où tu en as le plus besoin, cela t’assure qu’il y a quelqu’un là-haut qui t’aime vraiment beaucoup.
Même si tu crois pas à ça.
Mélanie, c’est «juste» une maman venue en camping avec son chum et ses 3 enfants. Elle travaille en CLSC, mais a déjà travaillé à Ste-Justine. J’ai beaucoup aimé sa façon de faire, de me faire comprendre qu’elle en savait assez pour me rassurer sans être la science infuse. On a constaté l’étendue des dégâts, qui se sont avérés assez minimes compte tenu de la situation. Elle a appelé Info-Santé. Elle est tombée sur une infirmière très sympathique dont les propos et conseils étaient logiques pour elle.
Finalement, ma fille de 3 ans a subi des brûlures au 2e degré relativement graves, mais sans plus. Elle en mourra pas, elle va peut-être en garder quelques craintes et 2 ou 3 cicatrices, mais elle a été chanceuse.
Quand un affaire comme ça arrive à ton enfant, et que tout compte fait, elle s’en tire «pas si mal», tu comprends qu’ils sont une gang là-haut à prendre soin de toi et de ce que tu as de plus précieux.
Même si tu crois pas à ça…
Les gens ont étés fantastiques; Mélanie, l’infirmière salvatrice, ma belle-sœur, qui a eu la présence d’esprit de sortir sa trousse de premiers soins, mon beau-frère qui s’est occupé de ma grande qui avait beaucoup de peine pour sa sœur, le pharmacien qui nous a rassurés et équipés pour diminuer sa douleur et éviter l’infection, l’infirmière du centre ambulatoire qui s’est occupé de ma touptite dans la progression de sa guérison et pour le don de tout le matériel nécessaire pour les bandages à changer quotidiennement. Le papa, mon chum, qui s’occupe de ces pansements, des becqué-bobo et des câlins, de tous ces gens qui m’ont dit à quel point j’ai été bonne de garder mon calme. Merci.
Quand tu repenses
à un événement comme ça, tu te dis que tu as aussi des anges dans ton quotidien, dans ta vie de tous les jours. Des gens qui, sans le vouloir, t’ont apporté beaucoup plus que ce qu’ils pensent. Qu’ils te permettent d’apprécier ce que tu as et de voir à quel point tu es chanceuse.
Et ça, t’as pas le choix d’y croire…